L'Infidélité répétitive

«Mon ami ne peut s'empêcher de me tromper...

La question :
Depuis 4 ans, je suis avec un homme qui ne me désire pas et qui me trompe. Pourtant nous sommes très câlins, très complices et nous nous entendons à merveille au quotidien. Je veux le quitter car il me demande d'accepter ses infidélités. Je l'aime infiniment mais j’aimerais qu’il me désire et qu’il cesse ses aventures sexuelles. Il se dit foncièrement libertin. Pour lui, il n'y a rien de mal à cela... Que dois-je faire ? 

Christelle Bonnet Psychologue clinicienne et psychothérapeute dit:

«D’après ce que je comprends, le fait que depuis quatre ans il ne vous désire pas et que vous ayez une relation d’amour et de tendresse platonique n’est pas un réel problème pour vous. Ce qui vous gêne et vous fait envisager sérieusement la séparation est qu’il voit d’autres femmes et qu’il vous demande d’accepter ses infidélités.
Quelle représentation de la sexualité vous êtes vous construite pour en arriver à accepter : 
- qu’il n’y ait pas de relation sexuelle entre vous
- ses propos blessants et maltraitants.
Dans un couple, il peut évidement y avoir des phases plus ou moins actives, et des périodes où les câlins, la tendresse, la complicité prennent le dessus mais tout ceci se regroupe finalement dans la sexualité.
De son côté rien n’est clair et c’est sans doute ce qui est gênant. Pourquoi entretenir une relation platonique quand on est si « branché » par la sexualité ? De même, le libertinage et les fantasmes deviennent un problème à partir du moment où tout autre sexualité devient impossible, particulièrement quand une sexualité amoureuse est impossible. Je pense que votre ami aurait beaucoup de bénéfices à réfléchir à ce qui l’a mené là. Mais en a-t-il envie ?
Je ne peux que vous conseiller de vous centrer sur vos envies, votre désir de vie et vos histoires passées qui vous ont peut-être fait croire que vous ne méritiez pas mieux et qu’il n’existait pas mieux. Faites attention à vous et ne vous oubliez pas, vous êtes la personne la plus importante de votre vie, pensez-y.»
Dois-je accepter les infidélités de mon ami ?
«La question :
Mon ami me laisse entendre qu'il faut que j'accepte ses infidélités, que c'est naturel pour tout homme d'avoir des pulsions de cet ordre, et que je ne devrais pas m'en faire une montagne puisque notre relation en resterait inchangée, voire fortifiée. J'ai beaucoup de mal a accepter cela... D'autant que notre vie sexuelle est très épanouie. Qu'en pensez-vous ? Christine, 34 ans

Catherine Solano est médecin et sexologue dit.
«Votre ami exprime qu'une infidélité de sa part ne changera aucunement ses sentiments à votre égard. Il le pense sans doute profondément. Mais il vous dit aussi que les pulsions de cet ordre sont naturelles chez un homme. C'est vrai, mais la pulsion est l'envie de réaliser quelque chose, et non le passage à l'acte. Ce sont deux choses extrêmement différentes. D'ailleurs, il en est exactement de même pour toute femme ! La pulsion d'infidélité, ou plus exactement l'attirance vers quelqu'un d'autre est naturelle, surtout au cours d'une relation de longue durée. La question est : « Que vais-je faire de cette pulsion ? » Ce qui revient à se demander : « De quoi ai-je envie ? Et de quoi l'autre a-t-il envie ? » Souhaitons nous une relation dans laquelle l'exclusivité sexuelle n'existe pas ? Ou souhaitons nous une relation de fidélité réciproque ?
Le problème est qu'il semble vouloir vous imposer son point de vue : « L'infidélité est naturelle et bénéfique », sans accepter de prendre en compte votre sensibilité. Et visiblement, ce n'est pas la même puisque vous parlez d'une montagne. Je pense que lorsque l'on aime, on doit être capable d'écouter l'autre, et de l'entendre. Et non pas seulement d'écouter ses pulsions à soi en cherchant des arguments pour les présenter à l'autre.
Il serait intéressant de vous demander d'où lui vient ce manque à combler, qui lui donne envie de relations en parallèle. A-t-il peur de la solitude ? De l'enfermement dans le couple ? Pourquoi et comment peut-il penser que l'infidélité n'a aucune incidence sur la relation de couple ? Et pourquoi, si elle en a une serait-elle forcément fortifiante ? Car l'expérience de sexologue montre qu'au contraire, l'infidélité est plus souvent destructrice… Pour communiquer avec lui, je vous conseillerais d'écouter son point de vue, mais de vous accrocher aussi le vôtre ! Lui dire : « Tu penses ceci, et moi, je pense autrement. » Lui dire aussi : « Quand tu agis ainsi, voilà ce que moi, je ressens… » Il s'agit de ne pas chercher la confrontation, mais d'avancer ensemble.»
Je pense aussi que si votre vie sexuelle est très épanouie, c'est le signe que vous avez une très bonne entente dans d'autres domaines. Car la sexualité est l'expression d'un dialogue et porteuse de sens. C'est un langage, et pas seulement une pratique. Alors, vous avez des atouts pour vous entendre malgré cette question difficile.»
Source:http://www.psychologies.com/Couple/Crises-Divorce/Infidelite/Reponses-d-expert/Dois-je-accepter-les-infidelites-de-mon-ami

Fidélité, infidélité : ce qui a changé
«Aujourd’hui, difficile de faire une croix sur ses désirs. Conjuguer amours légitimes et illégitimes : pari impossible ?
Peut-on encore être fidèle à l’autre toute une vie ? L’infidélité sexuelle est-elle « le » crime de « lèse-fidélité » ? Peut-on concilier harmonie du couple et épanouissement personnel ? Autant de questions qui se posent avec acuité, à une époque où amour de l’autre et amour de soi sont parfois en concurrence.
Conséquence du développement de la culture du moi, pointée comme un individualisme amoral par certains ou libération personnelle par d’autres ? Une certitude : l’individu est aujourd’hui plus que jamais maître de sa vie privée. Les institutions, laïques et religieuses, ne dictent plus les codes moraux. La suppression du divorce pour faute fait d’ailleurs partie des questions abordées dans le cadre des discussions sur la réforme de la famille, de la filiation et du divorce. A l’ère du « je-veux-tout », nombreux sont ceux qui s’appliquent à s’épanouir individuellement sans pour autant sacrifier leur couple, à aimer tout en se sentant libres, à vivre un amour infidèle.»
Combler le vide
«« Notre seuil de tolérance à la frustration est très bas. Les individus fonctionnent sur le principe de plaisir, analyse la psychanalyse Martine Teillac. Pour pallier le vide, la frustration ou la déception, on consomme. L’Autre devient un produit. »
La frustration naît d’une insatisfaction qui, dans le couple, peut avoir différentes causes : désir émoussé, communication enrayée, sexualité en décalage des partenaires, etc. L’infidélité vient souvent buter contre ce manque que l’autre ne parvient pas à combler. « C’est une idée largement répandue, en même temps qu’une erreur, de penser que l’autre a la capacité de nous donner ce qui nous manque, poursuit Martine Teillac. Quand notre partenaire habituel échoue à répondre à tous nos besoins, nous nous mettons en quête d’un autre pourvoyeur. »
Le refus de la frustration érigé en art de vivre, c’est aussi ce que pointe l’infidélité aujourd’hui. Parvient-elle pour autant à éluder la souffrance ? Rien n’est moins sûr.»
Le pari de la liberté
«« Je ne supporterais pas de faire souffrir mon partenaire » : cette phrase, qui revient dans la bouche de la plupart des infidèles, témoigne de la difficulté de vivre l’infidélité dans une totale légèreté.
Gérer sa culpabilité et éviter de faire souffrir l’autre, c’est le double défi qui se présente à tout candidat à l’infidélité. Car, à moins de maîtriser totalement son affectivité, sans états d’âme particuliers, l’infidélité peut difficilement aller sans souffrance. Une souffrance placée la plupart du temps sous le signe de la culpabilité, qu’elle soit nourrie par la peur de faire du mal à l’autre ou celle de fragiliser son couple. Régir cette culpabilité exige de pouvoir clairement faire l’état des lieux de sa relation première et de savoir ce que l’on cherche dans cet « ailleurs ». Pour que l’infidélité ne soit pas une fuite en avant éternellement recommencée.
Si les codes comportementaux et les discours sur l’infidélité ont changé, les motifs qui y conduisent demeurent, et s’établissent toujours fonction du parcours psychoaffectif de chacun. Le discours commun sur l’infidélité met en avant le désir de se revaloriser dans un regard neuf, de se procurer des sensations fortes ou encore un épicurisme revendiqué. Mais l’inconscient a des raisons que la raison, justement, ignore. Dans la recherche d’un amant, la femme peut être dans la quête non identifiée du partenaire idéal, figure paternelle fantasmée et à jamais inaccessible. L’homme infidèle, lui, peut être dans l’impossibilité de dépasser le clivage « mère ou putain ». L’infidélité n’a alors qu’une fonction : séparer l’amour de l’érotisme. Ainsi, tout ce que l’on met en jeu dans l’infidélité pose inévitablement des questions sur soi et a des répercussions dans la relation à son partenaire. Ne serait-ce que parce qu’en allant se nourrir ailleurs de ce qui fait défaut dans son couple, on prive ce dernier des soins qui pourraient le fortifier.
Pourtant, être infidèle à l’autre peut être un passage obligé pour rester fidèle à soi-même. Une liberté que l’on s’octroie afin de ne pas trahir celui ou celle que l’on est, un individu aux désirs multiples et parfois contradictoires.»